C'était ma première soirée. Et il faut dire qu'elle en jetait vraiment. La musique faisait vibrer tout mon corps et il y avait un sentiment d'hystérie naissante. Filles et garçons confondus, chacun faisait ce qu'il voulait. Dans un coin, sur un canapé se trouvaient un petit groupe d'amis qui discutaient avec fougue. Un peu plus loin, à côté des boissons se soûlaient des gens. Il y avait de la place pour danser et les gens ne se gênaient pas. Sensuellement, simplement ou amicalement, ils dansaient, créant un bazar et un brouhaha un peu fou me plaisant.

Soudain, je vis Lana partir en courant, suivie par un beau jeune homme. Ils étaient marrants. Je me dirigeai vers les boissons et me servis une sangria. J'en avais entendu parler de mes parents et j'avais maintenant envie d'en goûter. Mon verre à la main, j'allai m'asseoir sur le canapé en face du groupe d'amis qui gesticulaient. Passant une jambe sur l'autre, je m'installai confortablement et observais les gens en buvant lentement ma boisson alcoolisée.

Alors que je sirotais tranquillement ma boisson sur le petit canapé, Lana réapparut devant moi. Je manquais de lâcher mon verre et marmonnai dans ma barbe, paroles emportées par la musique. La jeune fille but une bière telle une alcoolique et je ne pus m'empêcher de me demander si elle avait déjà de "l'expérience" dans ce genre-là. Alcool, fête, et même sexe.
Ensuite, elle me hurla quelque chose que je pus entendre grâce à mes oreilles de loup-garou. Dis donc, elle hurlait vraiment, vraiment fort. Je grimaçai en me frottant les oreilles, un petit geste mignon qui me valut quelques regards intéressés. Désolé les gars ! Ah, mais attends, y'avait pas que des garçons. Une fille me regardait aussi, un regard noir pénétrant. Flippant aussi. Je me détournai et observai Lana qui débarrassait du monde. Elle était amusante à regarder, dans le genre animation de foire. J'entendis un "It's Lana, bitch" et je me dirigeai vers les deux filles. La loup-garou fusillait Lana du regard et celle-ci semblait plus méprisante que meurtrière. Soupirant, je repoussai les deux en arrière, les séparant et évitant ainsi un bordel pas possible.

"Qu'es'tu veux, sale..."

Elle ne put finir sa phrase que je l'avais attrapé par le bras, faisant en même temps pousser mes ongles devenus griffes tranchantes. Elles entaillèrent la peau de l'autre qui fixait stupidement le sang qui coulait de son bras. Je lui souris, un sourire d'ange qui n'allait pas, alors pas du tout avec ce que je faisais au même moment. Brusquement, violemment, j'entraînai la lycanthrope à ma suite et nous nous retrouvâmes juste devant la chambre, d'où sortait toujours une musique forte et entraînante.

La fille avait pendant quelques secondes mais avait ensuite abandonné l'idée, à la consternante vue du sang s'écoulant de son bras comme d'un ruisseau. Et moi je ne bougeais plus, me contentant de la fixer d'un regard dur, malgré le joli sourire sur mes lèvres. Les personnes qui passaient là nous dévisageaient une seconde avant de s'en aller en vitesse, comprenant que ça allait peut-être dégénérer. D'autres restaient pourtant non loin de nous, attendant l'explosion.
Qui n'arriva pas, à leur grande déception.
Je soupirai en voyant le regard meurtrier, un regard noir et pénétrant, de la jeune fille et la baffa. Sa joue devint écarlate et ses yeux s'écarquillèrent. Des taches rouges parsemaient maintenant le sol et nos vêtements, tandis que le liquide coulait le long de son menton et de ma main libre. La fille ouvrit la bouche pour crier, sûrement, mais la referma vivement lorsque j'approchai mon visage du sien. Mes lèvres frôlant d'abord les siennes, passèrent sur sa blessure sanglante, se teintèrent de rouge, s'arrêtèrent à son oreille.

- Tu hurles, je te déchire.

Les paroles, voletant tels des papillons, parvinrent à son cerveau, telle une claque. Elle ne bougeait plus et sa respiration se faisait sifflante, prouvant sa douleur et sa peur. J'eus un délicieux sourire. C'était la fille qui m'avait fixée, tout à l'heure. Je plaquai avec violence mes lèvres contre les siennes puis la repoussai en arrière. Elle tituba quelques instants avant de me fixer. Dans son regard, plusieurs émotions se disputaient. Colère. Peur. Satisfaction. Effroi. Désir. Douleur.
Je lui offris un sourire angélique avant de tourner les talons et de retourner dans la chambre.

A peine un mètre fait que je fus accostée par Lana. Un sourire aux lèvres, le rouge aux joues, les yeux qui brillaient, elle était sûrement...

- You are... Euh méchant chien chien vilain !

... complètement soûle. Je soupirai. Ma tête me tournait un peu mais rien de très grave. Mais avant que je ne pusse faire quoi que ce soit, elle m'entraîna à toute vitesse sur le balcon - depuis quand en avions-nous un ? - et tira un paquet de cigarettes de sa poche avant de m'en tendre une. J'acceptai son présent et j'haussai un sourcil, dubitative. Je n'avais jamais fumé de ma vie. Il y avait un début à tout, me disait un de mes amis. Je secouai la tête et lançai la cigarette, la laissant prendre son envol. Ou presque. Je sentis une odeur âcre et plissai mon nez. La question vint juste après :

- Alors les amours ?

Je lâchai un petit rire, "comme un carillon" disait ma mère, et répondis, sans aucune gêne.

- Gregory Adams, un Émeraude, il est pas mal du tout. Hm, sinon il y a ce blond, un Rubis.

Je souris et fis un geste de la main, et attendis que le verre d'alcool soit venu dans celle-ci avant de continuer.

- Mais rien de sérieux, je les trouve juste beaux. Et toi, ma belle ?

De petits surnoms, de temps à autre, prouvant notre amitié.

Oh tiens, elle avait dessoûlé. Tant mieux pour elle, si elle ne voulait pas avoir trop de problèmes avec les autres. Je souris.

- Haha Lena, tu es trop drôle, mais je vais te donner un conseil, quand tu n'aimes pas fumer mais que tu veux te donner un genre, n'avale pas la fumée, garde la dans ta bouche quelques secondes, sans gonfler les joues puis recrache la.

Je haussai les épaules et répondis :

- Je ne veux pas fumer.

Je n’aimais pas l’odeur, et je ne voulais pas me ruiner la santé avec un machin pareil. Sa remarque me fit sourire encore plus, j’adorais cette fille.
Je jetai un regard à ma montre et déclarai :

- Il est près de trois heures du matin, il faudrait virer les gens, non ? Sinon on aura des problèmes.

Je n’attendis pas sa réponse et entraînai Lana par la main. De retour dans la chambre, je baissai le son et hurlai :

- Allez tout le monde, dehors ! C’est fini, terminé, on rentre dans les chambres ! Allez, allez, plus vite que ça !

La plupart s’en allait facilement mais certains rechignaient. Je soupirais. Le pire truc, quand on organisait une fête, c’était la fin, quand il fallait mettre les gens dehors alors qu’ils ne voulaient pas. C’est bien pour ça que les videurs étaient appréciés.

Je peinais à faire sortir les derniers récalcitrants quand le garçon de tout à l'heure, celui qui jouait à chat avec Lana, et qui était vraiment appétissant, hrrmm, non, beau, vint à notre rencontre.

"Puis-je t'emprunter ton amie ?"

Je haussai un sourcil, croisai les bras et me tus. Pourquoi me demandait-il ? S'il voulait prendre Lana, qu'il le fasse ! Nous échangeâmes un regard puis il se mit à balader ses yeux sur mon corps. Pourtant je le sentais, ce n'était pas moi qu'il désirait. C'était la jolie fille à côté de moi. Je fronçai les sourcils. Une technique d'intimidation ? Mais vraiment, à quoi ça servait ? De une, comme dit plutôt, pourquoi demander la permission ? J'étais sûre qu'il allait se servir quoi que je dise. De deux, je n'avais pas peur des gens comme lui, suffisants et qui croyaient qu'ils étaient au dessus du monde.

"Dégagez!"

Je le regardais faire, le visage impassible. Hm, ça a fonctionné. Paaarfait ~
Je m'approchai de ce jeune homme jusqu'à qu'il n'y ait plus de distance entre nous et susurrai, menaçante malgré la différence de taille. Il ne m'intimidait pas, ce vampire. Et s'il croyait le faire, il se trompait lourdement :

"Tu veux donc l'emmener avec toi ? J'ai vu la lueur dans ton regard. Tu es assez dangereux, vampire. Que vas-tu faire ? Jouer un peu avec elle puis la jeter ? Je ne sais pas ce que tu comptes faire d'elle, mais de ton côté, prends garde. Le loup n'est jamais loin."

Je me reculai, tournai les talons puis lançai sans même le regarder :

"Je déteste les gens de ton genre. Tu me dégoûtes, vampire."

Mes dents s'étaient allongées, tout comme mes yeux qui étaient maintenant ceux d'un loup, d'une couleur ambrée, froide.

"La mort aussi, n'est jamais bien loin"
Je me crispai une seconde avant de me transformer en loup et de partir en courant. Il osait me menacer. Je découvris mes crocs, n'hésitant pas à bousculer les pensionnaires ébahis. Peu de loup-garous se transformaient dans le bâtiment. Je m'en fichais. Il m'avait énervée. Un peu plus et je lui sautais à la gorge. Un grondement sourd montait de ma gorge et soudain je me retrouvais à l'air libre. Tout ça en quelques secondes seulement. Les loups peuvent se montrer vraiment rapides. Et là, je m'assis sur l'herbe et hurlai ma haine envers ce vampire, déchargeant ma colère avant que je ne commette l’irréparable. Comme tuer quelqu'un, par exemple. Une minute passa. Je me retransformais, ma fourrure, mes crocs et mes griffes se résorbant. Je retrouvai forme humaine et retournai dans la chambre, courant. Je me sentais reposée.

Au moment où je pénétrai dans la pièce, Lana se retrouva sur son lit. J'écarquillai les yeux à la vue du sang. Sur son cou. Coulant doucement. Je me précipitai vers elle.

"Lena. Lena, réveilles moi demain."

Je grognai un instant avant de m'agenouiller devant son lit et de la prendre dans mes bras.

"Mais qu'est-ce que tu as foutu, Lana ? Je n'aurais pas du te laisser avec ce vampire... Mais regarde-moi ce qu'il t'a fait, p*tain !"

Mais elle ne pouvait plus rien voir, elle dormait déjà. Je pris son pouls et soupirai, soulagée. Et puis je me mis à lécher la morsure. Il n'y avait plus de sang dessus et la blessure était visible. Je grondais. Puis observais. J'avais cru entendre de ma mère, une fois, que la salive de loup-garou -et pas de loup, nuance- était réparatrice. Je n'y croyais pas. Mais je voyais que ça fonctionnait, et la morsure disparaissait à vue d'oeil. Je soupirai puis me glissai dans mon lit. Cette soirée m'avait épuisée.